15 octobre 2007

Le refus exprimé du parti du Président : un constat inavoué d’échec de la démocratie ?

Depuis plusieurs semaines, voire plusieurs mois, le microcosme politique mauritanien ne parle que du futur parti du Président qui verra sans doute le jour avant la fin de l’année 2007.
L’opposition et un parti de la majorité présidentielle (de l’ancienne coalition de l’opposition) déclarent leur opposition à la création d’un tel parti qu’ils présentent comme un futur parti-Etat.
Pourtant si les candidats non indépendants notamment Ahmed Ould Daddah ou Messoud Ould Belkheir avaient gagné l’élection présidentielle, est-ce qu’on aurait appelé à la dissolution du RFD ou de l’APP parce qu’ils seraient devenus des partis-Etat ?
Vu des pays des vieilles démocraties occidentales, on pourrait penser là à un totalitarisme politique indécent pour des partis politiques surtout d’opposition et ayant souffert par le passé de l’interdiction, entre autres. Les dirigeants du RFD et de l’APP, notamment, en savent quelque chose...
En fait, tout ce déchaînement de passion et de commentaires est tout simplement l’aveu de l’échec du processus de démocratie.
Le pouvoir en fait appartient toujours à une nébuleuse de l’ancien régime qui était organisée autour du parti-Etat, le PRDS, et dans les postes névralgiques de l’armée, qui est chez nous depuis 1978, tout sauf la grande muette.
L’APP qui est actuellement au coté de la majorité présidentielle n’a aucun poids politique en réalité: 5 députés sur 95 (6%) et un accord du Président qu’il peut à tout moment renier comme tout accord politique. En effet, les accords avec Messoud Ould belkheir ou Zein Ould Zeidane, n’ont de sens que s’ils étaient appuyés par une force au Parlement. Ce ne sont pas les scores du premier tour d’une élection présidentielle qui pèsent dans la pérennité d’un accord politique mais la force de blocage que les partenaires politiques de la coalition au pouvoir peuvent en être capable. L’angélisme en politique est une histoire souvent courte, pour ne pas dire existante...
Le candidat victorieux de la Présidentielle, dit indépendant, n’est pas un candidat indépendant. L’indépendance ce n’est pas ne pas appartenir à un parti politique mais plutôt ne pas être soutenu et lancé par un courant politique ou des forces politiques.
En définitive, le prochain parti du Président sera ni plus ni moins que l’ancienne formation au pouvoir, le PRDS, ses anciens partis satellites (RDU et UDP) et tous les opportunistes de la dernière heure!
Un président sans parti politique ne gouverne que par consensus, une sorte de cohabitation qui ne dit pas son nom et qui ne va pas souvent loin.
On comprend facilement la formation du premier gouvernement hétéroclite d’une nouvelle transition politique, sans aucune base parlementaire, en attendant une nouvelle restructuration après les élections.
La formation du prochain parti va faire une victime dans la majorité présidentielle actuelle : la marginalisation de l’APP puis son départ inéluctable du gouvernement.
Juste après l’investiture du Président des voix de l’opposition ont appelé à la constitution d’un gouvernement d’union nationale. Peine perdue.
Dans l’histoire politique de la Mauritanie, l’idée d’un gouvernement d’unité nationale remontait déjà au premier gouvernement de la Mauritanie formé en 1957 qui comptait 2 ministres sur 8 (avant qu’ils soient 10) du parti de l’opposition, l’Entente de Ould Horma, qui n’avait obtenu qu’un siège sur 24 à l’assemblée territoriale, équivalent de l’actuelle assemblée nationale. Cette fois, ce ne fut pas un gouvernement d’unité nationale mais une coalition d’entre les deux tours de la Présidentielle. Le destin des 2 gouvernements provisoires est sans doute le même, un échec inéluctable.
Nous sommes en réalité dans une seconde Transition voulue par l’armée et les ténors du pouvoir politique et économique.
Une réconciliation nationale dont les règles et le calendrier sont dictés par l’ancien pouvoir est lancée permettant de rassurer tout le monde et surtout de ne pas faire de vagues.
En jargon plus brut : rien n’a changé, on arrondit les angles ! C’est sans doute une vision politique mais ce n’est pas ce que des centaines de milliers de mauritaniens, qui ont voté naïvement pour Sidioca, attendaient de la nouvelle ère démocratique.
On ne refera pas l’élection présidentielle de 2007, mais chacun peut avoir son opinion et je persiste à dire, comme avant l’élection, que le pouvoir actuel n’est pas l’espoir d’un changement attendu pour la Mauritanie.
Toutes les affaires actuelles et les approximations politiques en peu de temps, après c’est vrai une période de Transition calamiteuse sur le plan économique (l’audit de la Transition attend toujours), ne sont pas pour nous rassurer, pardon rassurer le peuple que nous sommes et pas les anciens pontes ou les responsables qui traînent des casseroles pour ne pas dire parfois des cadavres…
Quelles propositions alors ? Car c’est cela le plus important. Il ne suffit pas seulement de critiquer.
A mon humble avis, il faut laisser le parti dit parti-Etat se former, c’est la démocratie qui le veut. Au vu des commissions déjà formées, il n’y a pas de surprise sauf pour les naïfs qui ont vu un changement venu d’un homme qui était hier à la retraite et qui depuis 20 ans était hors du circuit politique national.
J’avais dit sur ce forum avant l ‘élection présidentielle que l’espoir de changement ne viendrait que si Sidioca suive l’exemple de l’empereur romain Claude, en créant la surprise : se démarquer de l’emprise de ceux qui l’ont amené à briguer le suffrage universel avant que le peuple, seul détenteur de la légitimité national, lui donne le pouvoir pour 5 ans.
C’est une leçon pour tous les mauritaniens dans l’avenir et c’est à l’opposition d’être plus responsable et de ne pas se mélanger les pinceaux. On est avec le pouvoir ou on est contre le pouvoir, c’est tout. C’est la seule attitude de responsabilité politique.
En démocratie par ailleurs, les syndicats doivent prendre leurs responsabilités et se déterminer par rapport à la politique du gouvernement quel qu’il soit. Les rassemblements et les manifestations sont garantis par la Constitution et doivent être une forme d’expression.
En démocratie, les syndicats doivent s’exprimer et être écouter selon leur mobilisation. Dans les 5 années prochaines, le syndicalisme mauritanien doit renaître et se manifester pour compléter l’ossature d’une véritable démocratie, respectueuse de l’opinion de la majorité et de l’intérêt de tous.
L’important est de rester fidèle à ses convictions et de croire en la Mauritanie, c’est là l’avenir.
Rien n’est perdu, rien n’est gagné, tout reste encore à faire dans le respect des règles démocratiques!

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