23 mai 2007

Le renouvellement de la classe politique : la seule solution d’avenir pour instaurer une vraie démocratie en Mauritanie.

L’avènement de la démocratie en Mauritanie, en 2007, a suscité beaucoup d’espoir. Tout permettait de croire que la politique ne devrait plus être comme avant d’où le renouvellement de la classe politique attendu.
Le constat à l’issue des différentes élections et après la constitution de l’équipe gouvernementale est tout autre.
A vous de juger :
- Le Président de la République : un ancien ministre sous Mokhtar O. daddah, il y a près de 35 ans et un ancien ministre du dictateur déchu O. Taya.
- Le Premier ministre : un ancien conseiller économique du dictateur déchu et un ancien gouverneur de la BCM avec rang de ministre sous le même régime.
- Le président de l’Assemblée Nationale : un ancien ministre sous O. Taya.
- Le président du Sénat : un ancien ministre de O. Taya.
- Le chef de file de l’opposition : un ancien ministre de Mokhtar O. Daddah, il y a plus de 30 ans.
- Deux ministres de l’ancien régime qui n’ont marqué leurs passages aux responsabilités que par la gestion de l’incompétence, un ancien ambassadeur chargé de défendre la dictature auprès des instances des droits de l’Homme devenu ministre des affaires étrangères, etc.
C’est ainsi que les mêmes têtes du passé ressurgissent pour nous promettre un avenir meilleur. Seul changement, le mode de casting…
Et on nous parle de curriculum vitae au moment du choix des responsables mais on oublie que ceux qui ont des CV avec une expérience professionnelle actuellement en Mauritanie ont été parachutés une première fois, le plus souvent de rien, et depuis, ils sont « sur orbite », celle des grands postes de l’Etat, au service des différents dictateurs et de leurs lobbies.
Comment voulez vous présenter, par exemple, le CV de l’un des nouveaux ministres qui a été propulsé représentant à l’Unesco puis ambassadeur éphémère dans un pays du Moyen Orient alors qu’il était pigiste à Radio Mauritanie et aurait fait par la suite des études tardives et floues, en Europe de l’Est au moment de l’éclatement de l’URSS… Quand dans le même temps des intellectuels comme Abdelwedoud O. Cheikh, feu Saidou Kane et tant d’autres, moins connus, sont ignorés, écartés, diabolisés et n’ont jamais été sollicités ou appelés aux responsabilités qu’ils devaient naturellement occuper. Seuls les médiocres, les voleurs de deniers publics et leurs acolytes pouvaient se prévaloir d’avoir occuper des postes de décision et donc de prétendre rester aux commandes car ayant l’expérience qu’il faut et quelle expérience !

Il y a comme un deal politique, actuellement, qui ne dit pas son nom entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif.
On dirait un vilain compromis entre l’équipe Sidioca-ZZ-Belkheir d’une part et les partis de l’ancienne majorité et les indépendants-dépendants d’Ely qui seraient en hibernation pour 5 ans, d’autre part: laissez nous gouverner en appuyant notre politique (pas de motion de censure, votes des projets de lois proposées par le gouvernement) et nous vous laissons en paix (pas d’ouverture de vieux dossiers humanitaires ou économiques, pas de mise en cause des fortunes accumulées sur le dos du peuple, pas d’abolition des privilèges passés).
C’est ainsi que tout semble aller bien en Mauritanie... Pourtant, on assiste à une vraie inversion des rôles : la mafia représente maintenant le peuple et les dits « justes » sont aux commandes !
On peut conclure en fin de compte que la mafia a tout gagné, elle a acquis une légitimité populaire.
C’est toujours très inquiétant et n'augure de rien quand les rôles s’inversent. Hitler aussi avait l’adhésion du peuple allemand en 1933 et Al Capone était aimé dans les faubourgs de Chicago, dans le même temps. Et pourtant on connaît le terreau sur lequel se bâtissent la dictature et la pègre, son terrain de prédilection. En Allemagne, c’était la défaite de 1918 et la crise mondiale de 1929. A Chicago, c’était la corruption et la loi de la prohibition de l’alcool. Chez nous, c’est la dictature des régimes qui se sont succédés jusqu’au summum avec O. Taya, la gabegie, les détournements de deniers publics et le clientélisme.
C'est ainsi qu'en Mauritanie, en 2007, ne pouvaient plus prétendre à être élus dans nos villes, nos villages et nos campements que les mafieux en col blanc, ne pouvaient plus être nommés aux hautes fonctions que ceux qui ont servi sans mérite et se sont servis à satiété…

Les solutions existent et ce n’est pas un travail titanesque. Mais seul le Président élu a la possibilité d’impulser cette dynamique.
Il s’agit de la dissolution tout simplement de l’Assemblée Nationale, la chambre la plus importante du Parlement et la mise à la retraite anticipée de hauts gradés de l’armée et de la police ainsi que de hauts fonctionnaires de l’Etat bien connus (les Roumouz El Vessad). Cela doit se faire au bout de 2 ans au maximum, délai permettant d’asseoir les institutions de l’Etat sur de meilleurs bases et d’affaiblir « le monstre » qui peut avoir toujours des sursauts…
C’est le devoir qui incombe au Président de la République actuel, avant de laisser la place, en 2012, à une nouvelle génération.
Le courage politique, c’est de savoir remettre en cause l’ordre établi et avoir une vision d’avenir. Cela passe inévitablement par franchir le Rubicon, un vrai programme et une révolution douce, nécessaire en Mauritanie.