07 août 2008




La démocratie assassinée!


Merci à vous,
Merci à vous

Assassinée, ma bien aimée, la Démocratie !

Vous pourrez dès lors
Sur la tombe de la martyre
Porter votre funèbre toast

Assassinée la Démocratie !
Est-il un peuple au monde,
Qui assassine l'espoir ?

Ils t'ont tuée, Démocratie !
Quel peuple celui-là qui assassine
Le chant des rossignols !

Il n'y a plus que des meutes tuant des meutes,
Des renards tuant des renards,
Et des araignées tuant d'autres araignées

Démocratie, toi la martyre, toi le poème,
Toi la toute-pure, toi la toute-sainte
Le peuple de Mauritanie cherche sa reine des yeux,
Rends donc au peuple son salut !

Démocratie !
Sommes-nous une fois encore
Retournés à l'époque de la Jahilia ?
Voilà que nous revenons à l'ère de la dictature

Ils t'ont tuée à la Présidence
Comme n'importe quelle autre biche,
Après avoir tué le verbe

Au cours de l'instruction je dirai :
Le voleur s'est déguisé en général,

Je dirai au cours de l'instruction
Que je connais les noms, les choses, les prisonniers,
Les martyrs, les pauvres, les démunis

Je dirai que je connais les bourreaux qui ont tué ma bien aimée
Je reconnais les figures de tous les traîtres

Je dirai que leur vertu n'est que prostitution
Que leur piété n'est que souillure

Je dirai que notre combat pour toi est pur mensonge
Et qu'il n'existe aucune différence
Entre politique et prostitution

Je dirai au cours de l'instruction
Que je connais les assassins

Je dirai que notre siècle mauritanien
Est spécialisé dans l'égorgement du jasmin,
Dans l'assassinat de tous les prophètes,
Dans l'assassinat de tous les messagers

Même les yeux noirs
Les Généraux les dévorent
Même les tresses, mêmes les bagues,
Même les bracelets, les miroirs, les jouets

Même les étoiles ont peur de ma patrie
Et je ne sais pourquoi

Même les oiseaux fuient ma patrie
Et je ne sais pourquoi

Même les étoiles, les vaisseaux et les nuages,
Même les cahiers et les livres,
Et toutes choses belles
Sont contre mon pays

Je dirai au cours de l'instruction
Comment ma biche fut tuée
Par l'épée des Généraux

Tous les bandits, de l’Azawad à l'Atlantique
Détruisent, incendient, volent,
Se corrompent, agressent, violent les lois
Comme le veulent les Généraux

Tous les chiens sont des agents
Ils mangent, se soûlent,
Sur le compte des Généraux

Pas un enfant qui naisse chez nous
Sans que sa mère un jour
N'ait visité la couche d’un enfant des Généraux,
Pas une tête ne tombe sans ordre des Généraux

Les faux prophètes sautillent
Et montent sur le dos des peuples,
Mais n'ont aucun message !

Les traitres Généraux sauront un jour
Qu'ils ont tué notre bien aimée,
la Démocratie...


NB: Il s'agit d'une parodie du poème de Nizar Ghabani, Bilqis

19 juin 2008

AU SUJET DES ETATS GENERAUX DE l'EDUCATION:
Quelques réflexions et commentaires personnels sur l'enseignement des langues


Un effet d’annonce et un constat

Des états généraux de l'éducation seront bientôt tenus dans notre pays, une commission nationale vient d’être constituée.
Mais comme les journées de concertation nationale, il ne faut pas que ce soit juste des effets d'annonce et quelques conciliabules...
La présence de notre ami le Pr. ELY Mustapha, dans la commission nationale nouvellement mise en place, est une garantie certaine mais il est tout seul parmi une pléiade d'hommes du passé et du passif...

Je veux juste faire un constat sur les langues d'enseignement qui ne sont bien sûr qu'une partie de la question.

Les pays n'ont jamais pris leur destin en main et ont prospéré par leur génie et leur travail que quand ils ont réglé leurs questions nationales (ou en grande partie) et utilisé leurs langues nationales comme langues de travail.
En Occident où c'est la règle de tous les pays (Suède, Norvège etc., parmi les plus développés du monde), c'est le cas aussi du Japon, des pays de l'Amérique latine et ceux de l'ancien bloc de l'Est mais aussi des pays dits émergeants: la Corée du sud, Taiwan, la Chine, l'Inde, la Malaisie, la Turquie, l'Iran etc.
Ceux qui utilisent encore une langue étrangère comme langue principale du pays sont dans la misère économique et culturelle si ce n'étaient quelques ressources du sous sol épuisables.
On dirait qu'il existe des passerelles invisibles entre la situation socio-économique et l'identité culturelle...
Ce ne sont que des constations sommaires, je l'avoue...
Pour la Mauritanie, l'enjeu c'est dans 20 ans, 30 ans voire plus mais c'est celui de la Mauritanie de demain, des générations à venir.
Pour nous autres, c'est déjà scellé, nous sommes ce qu'avaient décidé le pays colonisateur et les 2 premières décennies d'atermoiement et de volte-face qui ont suivi l'indépendance.

A nous de préparer un avenir meilleur pour les générations futures, c'est là l'enjeu et quel énorme enjeu!

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Toujours au sujet des langues d'enseignement…

L’enseignement est à la base de tout développement, il n’y a pas de développement et de progrès sans éducation.
Et pour que les populations puissent bénéficier en quasi-totalité de l’éducation, il faut que celle-ci soit faite dans leur langue maternelle ou la langue la plus proche. Les langues étrangères ne doivent constituer qu'un apport complémentaire indispensable d'ouverture et d'échange avec le monde.
Cette approche est vraie quand il s'agit d'un pays à écrasante majorité parlant la même langue. C'est le cas de la plupart des pays du monde en dehors des pays d'Afrique subsaharienne dont le nôtre.

En Mauritanie, il faut savoir créer cette autre voie, une 3ème voie intermédiaire, tenant compte de l’histoire du pays, entre le bilinguisme avec prédominance du français (pré colonial et de la première décennie post indépendance) et l'arabisation généralisée et obligatoire (commencée au début des années 70 mais jamais totalement acceptée par toutes les composantes de la population).

Comment trouver une solution où tous les enfants mauritaniens, toutes composantes confondues, seraient dans les mêmes classes?

Est-ce que les adultes seraient assez mûrs pour penser à la Mauritanie au lieu de penser à leur seule composante ethnique ou culturelle?

Si aucun choix n'est possible, il ne faut pas avoir peur des mots: spécificité culturelle, choix culturel et même fédéralisme.

L'important c'est qu'il persiste un lien culturel indéfectible, un même enseignement de base et des échanges régionaux permanents.

L'essentiel c'est qu'une langue nationale (arabe, poular, soninké ou wolof) soit enseignée en premier à l'enfant et ce n'est que par la suite qu'il apprendra bien sûr et obligatoirement au moins une langue étrangère de dimension internationale: anglais (de préférence), français (compte tenu de notre histoire et de la culture des parents, "on ne choisit pas ses parents"...), espagnol ou même russe.

Les Norvégiens, les Suédois, les Japonais etc., qui sont les habitants des pays les plus développés du monde, enseignent et travaillent avec leurs langues nationales qui ne sont parlées que dans leurs seuls pays, les langues étrangères notamment l'anglais sont des langues de communication avec l'extérieur sans plus.

Nous n'avons certes pas le même niveau de développement mais c'est juste pour dire que ces pays ne se sont pas développés en utilisant l'anglais comme langue de travail dans leur pays...

Pourquoi nous ne sommes pas capables en Afrique subsaharienne, et notamment en Mauritanie, de faire de même, même s'il faut des décennies, voire des siècles?

Il est vrai que le monde devient une même planète et que les distances n'existent peut être plus mais il est une vérité: l'homme a toujours besoin de s'affirmer, de retrouver sa personnalité pour vivre, pour créer, pour se surpasser et cette affirmation de soi passe par son identité, sa culture, sa langue.

La Mauritanie de demain ne sera que ce que nous aurons choisi tous ensemble, sans contrainte et en toute liberté, les règles que nous nous aurons fixées et acceptées.
"L'obéissance à la loi qu'on s'est prescrite est liberté" disait Jean Jacques Rousseau dans Le contrat social.

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Esquisse de solution pour le système éducatif de demain

Cette proposition d’enseignement des langues dans notre pays me semble un compromis et une avancée. Elle peut être instituée dès la rentrée 2009-2010 pour tous les enfants qui commencent leur scolarité.

Voici ses 3 points essentiels :

- L’arabe, langue nationale officielle, obligatoire pour tous dès le primaire.
- Une langue nationale obligatoire parmi les 3 suivantes (poular, soninké et wolof) pour tous dès le primaire.
- Une langue étrangère parmi les 2 suivantes (français et anglais) obligatoire dès le primaire et l’autre langue étrangère dès le secondaire.

Ainsi tout enfant apprendra l’arabe, une langue nationale qui n’est pas l’arabe et une langue étrangère, et ceci dès le primaire, ce qui intéressera presque 80% des enfants mauritaniens (le taux de scolarité actuel).
Au secondaire, la priorité doit être à l’enseignement général avec une 2ème langue étrangère, permettant à l’enfant de connaître des horizons nouveaux dans le monde globalisé qui sera celui des décennies à venir.

Par ailleurs, l’enseignement ne doit pas être le seul creusé où les enfants se rencontrent.
Les activités de jeunesse (colonies de vacances, échanges entre régions, familles d’accueil d’ethnie différente etc.), le sport, les associations etc. sont aussi des lieux de rencontres et de brassage sans communes mesures.
Il ne s’agit pas seulement, à mon avis, d’une politique de l’éducation pour laquelle des états généraux sont sans doute nécessaires mais d’une politique d’ensemble avec une vraie volonté de coexistence sans laquelle rien ne sera possible quelles que soient les mesures prises.

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Combien avons nous eu de reformes de l'enseignement depuis notre indépendance?
Quatre en tout !


Avant 1967, c'était le système hérité du colonisateur, le français était omniprésent, l'arabe langue seconde (celle qui était là pourtant avant l'arrivée des français et chez toutes les ethnies) et les autres langues nationales inexistantes.
Le primaire comprenait 6 ans, le collège 4 ans (les fameuses 6ème, 5ème, 4ème et 3ème) et le lycée 3 ans (seconde, première et terminale).

La reforme de 1967 a imposé une première année d'arabe exclusivement puis 6 autres années avec le français le matin et l'arabe l'après midi.
Et comme le primaire est passé de 6 ans à 7 ans, le collège est passé de 4 ans à 3 ans (P, D et T) et le lycée est resté comme tel.
Je suis un des produits de la reforme 67, la première reforme.

Puis ce fut la reforme de 1973: les 2 premières années du primaire sont en arabe ainsi que l'enseignement des matières scientifiques.

Par la suite, en 1979, le Comité Militaire, après des tergiversations sous la pression de l’opinion publique qui voulait exister et aussi un peu de la rue, a adopté une reforme de l'enseignement en 2 filières séparées depuis le primaire: arabe et bilingue. La filière bilingue étant séparés en 2, au niveau de l’enseignement secondaire: prédominance du français ou presque exclusivement le français...
Ce sont les militaires qui ont ainsi institué la séparation des composantes de la population, le début de la déliquescence de l'Etat et de la perte de liens de l'enfance entre les différentes composantes du pays. Un prélude aux années de braises…

Ce n'est que 20 ans après, en avril 1999, alors que la fracture s'était déjà mal consolidée sur une déformation (comme diraient les orthopédistes), qu'on a pensé enfin qu'il fallait uniformiser l'enseignement, sur ses bases au moins, pour tous...
Cette reforme est venue unifier ce système, d’après ses promoteurs : le français est introduit à la 2ème année du primaire devenant la langue d’enseignement des matières scientifiques, l’arabe est la langue des matières littéraires et des sciences humaines alors que les langues nationales (poular, soninké etwolof) sont retirées simplement et progressivement du système éducatif.

A quand la prochaine réforme? Est-elle possible dans le respect de toutes nos cultures ? Est-elle nécessaire et utile?
Voilà les questions qui nous attendent, je crois, et sur lesquelles plane la question de la coexistence nationale et du respect de nos différences.

23 avril 2008

Charles Aznavour - Ils sont tombés!


A la mémoire de tous ceux qui sont tombés par la bêtise et la barbarie de leurs semblables.
En avril 89, loin de l'Arménie, des hommes sont tombés des deux cotés d'un fleuve sans savoir pourquoi...
Moi, je fais partie aussi d'un de ces peuples "qui n'a jamais baissé la tête sous l'injure, qui survit malgré tout et qui ne se plaint pas"...